Chaque année depuis 2014, la Direction Interministérielle de l’Innovation Publique organise, en novembre, le Mois de l’innovation publique. En 2021, la 8ème édition abordait plus particulièrement les pistes d’innovations au service de l’expérience agent et de l’expérience usager.
Cette initiative témoigne à la fois du caractère prioritaire de l’innovation dans les 3 fonctions publiques (État, territoriale et hospitalière) et du lien fort qui existe entre les usages proposés aux citoyens et aux agents publics.
Ces derniers mois, porté par le contexte de crise sanitaire qui a poussé la fonction publique, comme le secteur privé, à revoir ses pratiques internes, le rythme des transformations RH s’est accéléré. Collectivités et administrations bénéficient ainsi d’un niveau de maturité digitale croissant. Recrutement, gestion administrative du personnel, formation… tous les aspects des Ressources Humaines sont impactés, conformément à la « feuille de route SIRH 2022 » élaborée par le gouvernement.
Aujourd’hui, quel état des lieux de la digitalisation RH de la fonction publique peut-on dresser ? Quels sont les bénéfices attendus de ce virage numérique pour les gestionnaires RH comme pour les agents ?
Dématérialisation RH dans la fonction publique : un état des lieux
La digitalisation des processus RH n’a pas été le premier chantier de modernisation de la fonction publique. Bien que le virage du numérique ait été pris dès les années 2000-2010, les innovations mises en place à l’époque visaient principalement le citoyen et non l’agent. À partir de 2000, il a par exemple été possible de déclarer ses revenus en ligne et de consulter le site officiel service-public.fr, créé la même année.
Ce n’est qu’environ 10 ans plus tard que les premières mesures de dématérialisation des processus internes, et notamment des processus RH, ont vu le jour.
La première brique a été posée grâce au décret du 15 juin 2011 qui autorise la dématérialisation du dossier individuel de l’agent1. Depuis cette date, chaque collectivité peut décider de gérer de manière dématérialisée l’ensemble des pièces qui constituent les dossiers de ses agents (ou une partie seulement). Parmi ces documents, figurent :
- Les pièces qui concernent la carrière de l’agent : arrêtés de nomination, d’avancement, de promotion interne, de changement de position statutaire (détachement, mise en congé parental…)
- Le diplôme
- Les évaluations professionnelles
- Les formations suivies
- Les arrêtés de mise en congé (maternité, paternité, maladie…)
En 2016, le décret du 3 août est venu renforcer cette logique de digitalisation des processus RH en organisant la dématérialisation des bulletins de paie dans la fonction publique d’État, la rendant effective au 1er janvier 2020. Depuis, les bulletins de paie de chaque agent concerné sont ainsi mis à sa disposition sur l’Espace Numérique Sécurisé des Agents Publics de l’État (ENSAP).
Il est à noter que les fonctions publiques territoriales et hospitalières ne sont, quant à elles, soumises à aucune obligation.
Ce décalage entre les différents niveaux de maturité digitale dans la fonction RH est à l’origine de la « feuille de route SIRH 2022 », conçue dans le cadre du programme Action publique 2022. À travers celle-ci, l’État encourage les collectivités à rattraper leur retard en matière de transformation digitale de la fonction RH.
Dématérialiser les processus RH pour répondre aux enjeux principaux de la fonction publique
La feuille de route SIRH 2022 liste plusieurs objectifs : « Les capacités des systèmes d’information en termes de dématérialisation constituent un levier essentiel de modernisation. La dématérialisation permet en effet de faciliter le partage et l’échange d’informations et de documents, d’envisager de nouveaux usages et amène à revoir les processus et les organisations dans une optique de rationalisation et de simplification […] des données publiques »2.
Concrètement, pour les services RH, la dématérialisation des documents RH et des processus est tout d’abord synonyme de productivité. Elle permet ainsi de mettre fin à un certain nombre de tâches répétitives et chronophages : impression des documents, mise sous pli, affranchissement, classement manuel dans les dossiers des agents… À la clé, plusieurs heures de travail économisées chaque mois au sein de l’équipe RH et une capacité à se concentrer sur des tâches à plus forte valeur ajoutée pour les agents.
Les documents, stockés de manière sécurisée dans des dossiers dématérialisés, sont plus facilement accessibles pour les personnes habilitées. Ces dernières peuvent alors en quelques clics transférer un duplicata à un agent qui en fait la demande par exemple. Une souplesse d’autant plus appréciable pour les gestionnaires RH suite à la signature du premier accord relatif à la mise en œuvre du télétravail dans la fonction publique, le 13 juillet 20213. Ce développement du travail à distance dans la fonction publique impose, en retour, une digitalisation croissante des processus internes et en particulier des processus RH. L’objectif : faciliter le travail collaboratif à distance.
Au-delà du gain de temps et de flexibilité permis à l’équipe RH, la digitalisation des processus présente une véritable cohérence avec la logique de contrainte budgétaire à laquelle sont soumises les collectivités : les tâches quotidiennes sont rationalisées, optimisées. Les économies d’impression et d’affranchissement sont par ailleurs réelles et contribuent à atteindre des objectifs ambitieux de réduction des coûts.
L’expérience agent au cœur des préoccupations
« L’expérience agent », tout comme « l’expérience collaborateur » au sens large, correspond au ressenti d’un membre du personnel face à sa situation de travail (qu’il soit agent de la fonction publique ou salarié d’une entreprise privée).
Or, dans son quotidien, l’agent est aujourd’hui témoin de deux phénomènes simultanés :
- Dans sa sphère professionnelle, il assiste à la digitalisation de la relation citoyens – collectivité. Il en est d’ailleurs le garant au quotidien depuis de nombreuses années.
- Dans sa sphère privée, il expérimente chaque jour une digitalisation croissante de ses propres pratiques. Celles-ci sont alors de plus en plus en décalage avec les usages qui lui sont proposés dans le cadre de son activité professionnelle.
Spectateur de cette double tendance, l’agent accepte de moins en moins bien l’asymétrie qu’il observe avec les usages qui lui sont proposés dans son quotidien professionnel. Lui proposer des usages en phase avec ses attentes devient donc une nécessité. Le parallèle est simple : si la qualité de service attendue envers les citoyens est élevée, l’administration n’a d’autre choix que de fournir à ses agents un niveau de service de qualité équivalente en interne.
La dématérialisation RH permet alors d’améliorer l’expérience agent en facilitant notamment leur accès à l’ensemble des documents qui accompagnent leur carrière : fiches de paie, arrêtés de promotion interne, évaluations annuelles…
Grâce à la solution DEMAT RH® par exemple, tous ces documents sont accessibles à n’importe quel moment dans leur espace personnel en ligne myPrimobox®. Côté sécurité, les données sont stockées en France sur des serveurs respectant la norme ISO 27001. De quoi rassurer les agents qui formuleraient des craintes quant à la sécurité de leurs données personnelles.
Pour la collectivité, la stratégie s’avère également gagnante en termes d’image employeur. Sa capacité à attirer de nouveaux et jeunes talents est accrue. Or, pour permettre à la fonction publique de prendre un tournant digital global, il est aujourd’hui essentiel qu’elle soit en capacité de recruter des profils variés et représentatifs de la société actuelle.
A l’aube de l’année 2022, de nombreuses collectivités ont amorcé la digitalisation de leurs processus RH, renforçant ainsi le cercle vertueux de l’innovation dans la fonction publique. Ce déploiement est toutefois encore inégal sur le territoire et reste un défi stratégique à relever en 2022.