Le nombre de fusions-acquisitions a augmenté de 18% au deuxième semestre 20201. En cause, le terreau fertile créé par la crise sanitaire. En effet, au cours de cette période, de nombreuses entreprises ont pris conscience de manière accélérée des enjeux qui les attendaient : nécessité d’innover, de passer au tout numérique, de recentrer leur activité ou au contraire de la diversifier… Les opérations de rachat d’entreprises se sont alors multipliées.

En réalité, 60% d’entre elles se solderont vraisemblablement par un échec.

Dans la plupart des cas, c’est l’importance trop faible accordée au facteur humain qui sera à l’origine de la déconvenue2.

Souvent vue comme une opération financière avant tout, une « fusacq » représente pourtant, pour les salariés des deux entreprises qui se rapprochent, une période d’incertitude. Celle-ci peut, si la situation n’est pas prise en main par la Direction des Ressources Humaines, mener à un désengagement des collaborateurs, à des incompréhensions et, in fine, à l’échec de l’opération.

Pour ne pas en arriver là, les RH ont un rôle essentiel à jouer en instaurant une communication régulière et transparente avec les collaborateurs.

Quels objectifs les Ressources Humaines peuvent-elles se fixer dans le cadre d’une fusion-acquisition ? Quels sont les risques d’une mauvaise communication RH ? Comment mettre en place une communication interne efficace dans le cadre d’un tel projet ?

Pas de fusion-acquisition fructueuse sans une bonne communication RH

Les objectifs de la communication RH dans le cadre d’une fusion-acquisition

Les conditions du succès d’une opération de fusion-acquisition sont propres à chaque entreprise. Il peut, par exemple, s’agir d’améliorer la rentabilité, de conquérir de nouvelles parts de marché, de réaliser des économies d’échelles…

Quels que soient les indicateurs de performance retenus, plusieurs objectifs vont devoir être atteints sur le plan Humain pour que l’opération puisse être qualifiée de succès à l’heure où il faudra en dresser un bilan.

Le premier objectif de la communication RH interne dans le cadre d’une fusacq est de maintenir l’engagement des collaborateurs tout au long du processus. En effet, en amont de l’annonce officielle de l’acquisition, de nombreuses rumeurs peuvent voir le jour et conduire à des spéculations. Le risque est que la performance opérationnelle des équipes s’en ressente3 : la qualité des produits et services et le chiffre d’affaires peuvent, par exemple, être directement impactés.

En deuxième lieu, la communication RH a un rôle crucial à jouer pour limiter le turnover des équipes. Pour atteindre cet objectif, l’équipe RH doit avoir à cœur de rassurer et de limiter le stress des salariés. En effet, l’incertitude dans laquelle ils se trouvent au moment d’une acquisition est un facteur pouvant déclencher une vague de départs à la fois importante et non souhaitée.

Enfin, l’équipe RH va pouvoir intervenir sur un troisième volet : celui de l’instauration d’un contexte favorable aux synergies, condition sine qua non du succès de la fusacq. Pour cela, il est nécessaire d’obtenir l’adhésion des salariés des deux entreprises pour limiter la résistance au changement. Il va alors falloir convaincre la majorité des salariés des avantages de cette acquisition.

Préparer la communication RH pendant la phase amont du projet

Pour répondre à ces objectifs, il est important d’élaborer une véritable stratégie de communication RH. Celle-ci permet notamment de bien cadrer la phase qui précède l’annonce officielle. La première étape consiste alors à nommer un chef de projet. Véritable chef d’orchestre, cette personne aura pour mission de coordonner les différentes actions et interlocuteurs en interne. Le projet ayant vocation à courir sur plusieurs mois, il pourra être judicieux de réaliser un plan de communication. Celui-ci pourra notamment contenir les objectifs à atteindre, la durée de chaque action ainsi que le budget associé4. À chaque objectif pourra être associée une estimation du risque encouru en cas de non atteinte de celui-ci. Nous pouvons, par exemple, citer la nécessité d’identifier les collaborateurs clés qui devront être fidélisés à court ou à plus long terme5. Dans le cadre de cet exemple, en cas de non atteinte de cet objectif, le risque est de voir partir des ressources qui détiennent une grande partie de l’historique ou du savoir-faire de l’entreprise acquise. Une menace particulièrement prégnante dans le cadre du rachat d’une entreprise évoluant sur un marché non maîtrisé par la société acquéreuse.

La phase amont du projet sera également l’occasion de préparer l’annonce de cette acquisition : quels bénéfices souhaite-t-on mettre en avant : pour les salariés ? pour les clients ? pour la qualité des produits et services ? Il faudra alors veiller, dès les premiers temps à communiquer des jalons et des objectifs à l’ensemble des collaborateurs. Pour cela, il apparaît nécessaire de préparer un support de présentation qui permettra de structurer le discours lors de l’annonce officielle.

Pour réaliser ces différentes actions, les RH ont tout intérêt à identifier les personnes qui vont pouvoir intervenir à leurs côtés. C’est notamment le cas des équipes de communication interne, des directeurs et des managers par exemple.

Après l‘annonce, miser sur l’accompagnement au changement

Une fois l’annonce faite en interne, s’ensuit une période déterminante dans le succès de l’opération globale. Les collaborateurs vont inévitablement être amenés à s’interroger : vais-je conserver mon poste ? Mes avantages vont-ils évoluer ? Vais-je avoir un nouveau manager ? Plus le service RH jouera la carte de la transparence, plus il aura de chances de remporter l’adhésion des plus sceptiques.

Plusieurs canaux de communication peuvent alors être utilisés. Pour les annonces officielles et les grands messages (déménagement, plan de sauvegarde de l’emploi, plan de départ volontaire…), les communications orales seront à privilégier afin de donner aux collaborateurs la possibilité de poser leurs questions. Elles pourront être faites, selon le degré d’importance du message, soit par la direction directement soit par l’intermédiaire des managers qui auront eu la primeur de l’information. Si vous comptez vous appuyer sur vos managers pour relayer les informations en interne, ne sous-estimez pas l’importance de les former à des techniques d’accompagnement au changement. Certains d’entre eux pourraient en effet se sentir démunis face aux objections formulées par les membres de leur équipe.

Pour synthétiser les informations communiquées oralement ou pour y apporter des précisions suite à des questions posées par des collaborateurs, un support écrit pourra faire suite au canal oral. Que celui-ci prenne la forme d’une newsletter interne, d’une note d’information ou d’une fiche de questions/réponses, il donnera aux collaborateurs la possibilité d’assimiler les informations et de s’y référer ultérieurement en cas d’interrogation. A noter que l’ensemble de ces documents peuvent être envoyés de manière dématérialisée pour en simplifier l’accès.

Dans les premiers temps du rachat, il est également primordial d’organiser des temps de rencontre et d’échange entre les collaborateurs des deux entreprises. Séminaire, team-building… Ce n’est qu’en commençant à bâtir une histoire commune qu’une culture d’entreprise unique pourra émerger.

Parmi les différentes techniques d’accompagnement au changement qui peuvent être appliquées, celle de la co-construction6 est particulièrement intéressante. Elle consiste à impliquer les salariés des deux entreprises dans l’écriture de la nouvelle page de l’histoire de leur société. Cette démarche pourra prendre la forme d’ateliers auxquels assisteront des salariés des deux entreprises. Ces sessions permettront, par exemple, de :

  • imaginer l’avenir des différents produits
  • comparer les outils en place dans chaque entreprise en vue de les harmoniser
  • définir des méthodes de travail et process communs.

Dans le cadre d’une fusion-acquisition, il est à noter que le rôle du service RH continue à être déterminant au-delà de l’apparition des premières synergies. Il est en effet crucial de communiquer auprès des collaborateurs sur les bénéfices de cette opération. Des équipes des deux entreprises ont travaillé main dans la main pour signer un gros projet ? Parlez-en dans votre newsletter interne, remerciez les principaux intéressés et célébrez tous les succès de cette fusion-acquisition. Autant de signaux positifs envoyés à vos collaborateurs qui contribuent à sceller le destin des deux entreprises.

Sources

  1. https://www.pwc.fr/fr/espace-presse/communiques-de-presse/2021/mars/la-valeur-des-fusions-acquisitions-explose-au-deuxieme-semestre-2020.html
  2. https://akoya.group/wp-content/uploads/2017/04/AkoyaDisrupt-MA-Guide_pratique.pdf
  3. https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/reussir-les-fusions-acquisitions-limportance-critique-de-laccompagnement-humain-131413
  4. https://www.fusacq.com/ae14,comment-la-communication-interne-peut-elle-favoriser-l-integration-du-personnel-lorsqu-il-y-a-fusion-d-entreprises
  5. https://www.daf-mag.fr/Thematique/gestion-risque-1241/Breves/reduisez-risques-echec-grace-audit-339343.htm
  6. https://www.wavestone.com/app/uploads/2017/09/conduite-du-changement.pdf